Jul 8, 2025
En Belgique, la révolution de la micromobilité partagée s’accélère à un rythme inédit. Autrefois considérée comme une alternative ponctuelle ou saisonnière, la trottinette électrique s’est imposée comme un véritable mode de transport du quotidien dans les centres urbains. Selon le rapport Shared Mobility in Belgium 2024 – Way To Go, ce marché a atteint une nouvelle phase de maturité, portée par l’usage croissant des trottinettes partagées dans toutes les régions du pays.
Au début de l’année 2024, la Belgique comptait plus de 45 000 véhicules partagés en circulation. Ce chiffre inclut les vélos, scooters et voitures, mais c’est bien la trottinette électrique qui domine le paysage. À elle seule, elle représente plus de 60 % de cette flotte, soit environ 27 000 unités, en progression constante depuis plusieurs années. Cette croissance traduit un changement profond des comportements de déplacement, notamment dans les zones urbaines où la voiture perd du terrain.
Les opérateurs tels que Lime, Dott, Bolt ou encore Tier continuent d’investir massivement, à la fois dans le renouvellement de leur flotte et dans leur déploiement territorial. Ces entreprises ne se contentent plus de viser Bruxelles ou Anvers : elles explorent aussi des villes comme Namur, Louvain, Courtrai ou Charleroi, où la demande locale croît au rythme des embouteillages et des politiques publiques de décarbonation.
Le profil de l’usager belge de trottinette électrique a lui aussi évolué. L’utilisateur type n’est plus uniquement un jeune urbain branché à la recherche d’un transport rapide pour ses soirées. Désormais, les statistiques montrent une adoption beaucoup plus transversale. Près d’un tiers des trajets sont réalisés par des personnes âgées de 35 à 55 ans, tandis que l’usage s’intensifie aux heures de pointe, notamment en semaine.
Les trajets effectués sont courts — la majorité ne dépasse pas trois kilomètres — mais ils sont de plus en plus intégrés à des chaînes de mobilité. On utilise la trottinette pour rejoindre une gare, un arrêt de tram, ou pour parcourir le dernier kilomètre depuis un parking relais. Ce rôle d’intermédiaire dans la chaîne de déplacement est précisément ce qui confère à la trottinette électrique partagée une place stratégique dans la mobilité urbaine contemporaine.
Bruxelles demeure sans conteste le centre nerveux de la micromobilité partagée. La région capitale regroupe à elle seule plus de 10 000 trottinettes électriques actives en libre-service. Les politiques publiques y sont plus avancées : zones de stationnement obligatoires, partenariats avec les opérateurs, intégration dans les apps MaaS (Mobility as a Service) et développement d’un cadre réglementaire spécifique.
Mais l’une des dynamiques les plus remarquables vient de Flandre. Des villes comme Gand, Anvers ou Louvain multiplient les initiatives pour favoriser une cohabitation plus fluide entre les usagers, notamment en développant des hubs de mobilité. Ces espaces permettent de regrouper trottinettes, vélos et transports publics dans un même périmètre, facilitant les correspondances et réduisant le désordre sur la voie publique.
L’avenir de la trottinette partagée en Belgique ne se jouera pas uniquement sur la taille des flottes ou la vitesse de déploiement. L’enjeu est désormais l’intégration intelligente de ces services dans l’écosystème global de transport. Cela implique une meilleure interopérabilité avec les réseaux de transports en commun, un accès simplifié via les plateformes numériques, et une approche data-driven pour adapter l’offre à la demande réelle.
L’autre défi majeur est celui de la régulation du stationnement. Les villes doivent jongler entre liberté de mouvement, occupation de l’espace public et sécurité. Certaines expérimentent la géolocalisation fine avec zones virtuelles de stationnement, d’autres testent des incitations financières pour encourager les “bons comportements” de la part des usagers.
Enfin, la question de la durabilité reste centrale. Si les trottinettes permettent de réduire l’usage de la voiture en ville, leur impact environnemental dépend aussi de leur durée de vie, de la qualité de leur maintenance et des méthodes utilisées pour leur recharge. Sur ce point, certains opérateurs commencent à expérimenter des modèles logistiques plus écologiques, à l’image de Lime en Allemagne, qui utilise désormais des vélos cargos pour remplacer les batteries sur le terrain.
Ce que révèle ce rapport 2024, c’est que la micromobilité partagée en Belgique n’est plus un simple complément aux transports publics, mais un acteur de transformation urbaine. La trottinette électrique, en particulier, incarne cette nouvelle manière de penser la ville : plus fluide, plus flexible, plus propre.
Mais pour que cette transition soit durable, elle devra s’accompagner d’un dialogue constant entre opérateurs, collectivités et citoyens. Car la micromobilité ne se décrète pas. Elle se construit, mètre après mètre, trajet après trajet, avec une vision partagée de ce que doit être la ville de demain.
source : Waytogo